Marie « Mère abandonnée » apparaît dans un quartier populaire de Lyon

Anne-Marie Coste (1861 – 1924) est une Lyonnaise modeste, pieuse et effacée. Elle travaille comme lingère et loge sous les toits d’un immeuble du quartier de la Croix-Rousse. Elle laisse le récit de plusieurs apparitions dont la Vierge Marie la gratifia entre le 6 novembre 1882 et le 22 septembre 1883. Marie se présente comme une « Mère abandonnée » et demande qu’un culte particulier lui soit rendu sous ce nom. Anne-Marie devient par la suite religieuse et prend le nom de sœur Marie de l’Eucharistie.

La face Saône de la Croix-Rousse au début du XXe siècle. / © CC0/wikimedia

Les raisons d'y croire :

Lors de sa première apparition, la Vierge Marie appelle Anne-Marie Coste par son prénom de baptême, connu de très peu de gens, et non par le pseudonyme d’Annette utilisé par tous à ce moment-là.

Anne-Marie souffrait d’une arthrite cervicale qui l’obligeait à porter un corset. Elle s’est rendue plusieurs fois à l’hôpital de la Croix-Rousse entre 1879 et 1882 à cause de sa maladie. Début janvier 1883, après la fin du cycle des apparitions, les médecins constatent sa guérison. La Vierge lui avait dit en effet « Tu souffres beaucoup, eh bien, je viens te consoler. »

Les médecins ont également vérifié la guérison inexplicable d’un homme aveugle ayant retrouvé la vue après avoir prié à ses côtés.

Les messages recueillis sont en tous points conformes à la tradition chrétienne : prière, pénitence, conversion. « Je suis une Mère abandonnée ! La cause de mon chagrin, c’est l’ingratitude de mon peuple. […] Il faut que mon peuple se convertisse, qu’il fasse des pénitences et qu’il prie avec plus de ferveur. »

Anne-Marie a peu de culture religieuse : maintes expressions utilisées par la Vierge lui sont inconnues (comme par exemple « le bras de mon Fils »).

Les fruits spirituels de ces apparitions sont importants : Anne-Marie prend l’habit religieux chez les Sœurs de Saint-Joseph à Saint-Priest-en-Jarez.

Hormis ces apparitions, Anne-Marie n’a jamais plus allégué de grâce mystique. Elle mène une vie ordinaire de religieuse. Son comportement a toujours été exemplaire en tous points : humilité, désintéressement, charité, contemplation, obéissance.

Dans l’entourage du bienheureux père Chevrier, fondateur de l’institut du Prado, la mémoire d’Anne-Marie a toujours été conservée.

Synthèse :

Anne-Marie Coste (1861 – 1924) connaît une jeunesse difficile. Issue d’un milieu défavorisé du quartier lyonnais de la Croix-Rousse – son père est tailleur de pierres et elle est l’aînée de dix enfants –, elle est malade dès son adolescence. Atteinte d’arthrite cervicale, elle souffre atrocement, mais ne se plaint jamais.

Le 6 novembre 1882, elle est hospitalisée. Son corps est un champ de souffrance. La jeune femme prie sans cesse. Soudain, elle entend une voix féminine inconnue, très douce : « Anne-Marie, Anne-Marie… » Elle lève la tête dans un grand effort et, là, à deux mètres d’elle, dans une lueur extraordinaire, elle voit une personne dont elle a d’abord un peu de peine à saisir les traits. Elle expliquera qu’elle voit d’abord comme une ombre. Puis l’ombre devient une femme… La Vierge Marie se tient devant elle et lui dit : « Je t’apparais sous la forme sous laquelle tu aimes le mieux me prier ! » « Notre Dame de Fourvière », s’exclame à présent la voyante.

Ce soir-là, Marie lui laisse un message prophétique : Lyon connaîtra de graves châtiments si ses habitants ne se convertissent pas. Brusquement, la Mère de Dieu disparaît et Anne-Marie ressent une chaleur inhabituelle dans son corps : elle vient d’être guérie de son arthrite.

D’autres apparitions vont suivre, dont celle du 2 janvier 1883, dans la soupente du petit logement de la voyante. Même lumière ineffable, même douceur surnaturelle, mêmes vêtements royaux… « Je suis une Mère abandonnée », dit Marie d’une voix triste, puis d’un ton ferme : « Ce qui me cause du chagrin, c’est l’ingratitude de mon peuple. Vous ferez des neuvaines dans toutes les paroisses, dans toutes les communautés. »

En 1883, Marie apparaît encore seize autres fois. Des guérisons sont rapportées, comme celle d’un aveugle qui recouvre la vue après avoir prié avec Anne-Marie. Marie est parfois accompagnée de l’Enfant Jésus et elle demande de faire frapper une médaille à son effigie, comme à la rue du Bac.

Le clergé diocésain se montre ouvert et attentif. Les pères Carillon, aumônier des religieuses de Saint-Charles, Deflotrie et Louis Deguery visitent et interrogent la voyante. Ils communiquent leurs informations à l’archevêque, Mgr Louis Caverot. Sur conseil du supérieur du grand séminaire de Saint-Irénée, celui-ci décide de ne pas mener d’enquête canonique, ce qui ne signifie en rien un avis négatif ! Le prélat désigne un directeur spirituel à Anne-Marie, grâce auquel elle sait dorénavant ce qu’elle doit faire : servir Dieu en devenant religieuse.

Elle prend effectivement l’habit en 1891 chez les Sœurs de Saint-Joseph de Priest (France, Loire).

Patrick Sbalchiero

Au-delà des raisons d'y croire :

L'abnégation d'Anne-Marie Coste a achevé de convaincre ses contemporains qu'elle fut une femme entièrement donnée à Dieu et aux autres.

Aller plus loin :

Louis de Cissey, LesApparitionsdelaViergeàLyonen1882et1883, Cîteaux, Imprimerie Saint-Joseph, 1884.

En savoir plus :

RenéLadous, "Coste (Anne-Marie)", dans DictionnairedumondereligieuxdanslaFrancecontemporaine, t. 10, Paris, 2001, p. 61-63.
Le site internet du musée du Diocèse de Lyon sur Anne-Marie Coste.
Relation des Visions d’Anne-Marie Coste par elle-même, 22 pages manuscrites, Archives du diocèse de Lyon.
Lameire Gilles, La croix brisée sur le globe : apparitions de la sainte vierge à Lyon et principalement à la Croix-Rousse en 1882 et 1883, Résiac, 1997.