Recevoir les raisons de croire
< Toutes les raisons sont ici !
TOUTES LES RAISONS DE CROIRE
Guérisons miraculeuses
n°259

Canada

1999

Le miracle qui a conduit frère André sur les autels

Il aura fallu plus de soixante-dix ans pour conclure la cause de canonisation du frère André, fondateur de l’oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal. Décédé en 1937, à l’âge de quatre-vingt-onze ans, le frère André a finalement été élevé au rang de saint par l’Église catholique le 17 octobre 2010. C’est la guérison surprenante d’un enfant ayant subi un grave accident de la route en 1999 qui a fait l’objet d’une enquête diocésaine en février 2005. Le dossier de cette guérison a été soumis aux commissions vaticanes. De façon unanime, les médecins, les théologiens puis le Saint-Père ont conclu à une guérison scientifiquement inexplicable, attribuable au bienheureux frère André. C’est à lui que les parents du garçon ainsi que des amis de la famille avaient adressé leurs prières en espérant l’impossible.

Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal (Montréal) / © CC BY 2.0 DEED, Guilhem Vellut, flickr.
Oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal (Montréal) / © CC BY 2.0 DEED, Guilhem Vellut, flickr.

Les raisons d'y croire :

  • Pour qu’une personne bienheureuse soit déclarée sainte, un miracle doit être attesté et avoir eu lieu après la béatification. Dans le cas du frère André, des dizaines de faveurs obtenues par son intercession ont été évaluées, pour finalement retenir le cas le plus pertinent.
  • Heurté par une voiture alors qu’il faisait du vélo, un Canadien âgé de neuf ans souffre d’un grave traumatisme crânien et d’une importante hémorragie cérébrale. Les médecins expliquent aux parents que l’état de santé de leur enfant ne laisse pas place à l’espoir. Après trois semaines de coma, l’assistance respiratoire qui maintient artificiellement l’oxygénation de l’enfant est enlevée.
  • Ce même jour, à l’oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal, des proches de la famille se recueillent et demandent la guérison complète du garçon par l’intercession du frère André. La famille, qui voue au bienheureux une grande dévotion, poursuit ses prières.
  • À partir de ce moment-là, au lieu d’empirer jusqu’au décès annoncé par les équipes médicales, la santé de l’enfant progresse nettement et spontanément : il peut à nouveau respirer de lui-même et sort du coma, sans garder de séquelles. Étant donné son état critique après l’accident, il s’agit d’un rétablissement non seulement inattendu, mais aussi exceptionnellement rapide, que la médecine ne peut expliquer.
  • Pour être déclarée miraculeuse, la guérison doit répondre à quatre critères : avoir été quasi instantanée à la suite de la faveur demandée, être inexplicable, sortir de l’ordinaire et être définitive et durable dans le temps. La guérison de l’enfant canadien remplit donc tous les critères nécessaires pour être qualifiée de « miraculeuse » : la commission médicale mandatée a rendu un verdict favorable et unanime le 26 février 2009.
  • La guérison a été étudiée à la fois par des experts médicaux et par des théologiens pour évaluer si le geste de foi en est bien la raison. Il faut pouvoir démontrer qu’on a bel et bien eu recours à l’intercession du frère André, et seulement à lui.

Synthèse :

Alfred Bessette, connu sous le nom de frère André, est né en 1845 au Québec, dans une famille pauvre et très nombreuse, comme il en existait alors dans la Belle Province : huitième d’une famille de treize, il est bientôt orphelin. Son père, bûcheron, est victime d’un accident en forêt quand l’enfant a neuf ans. Trois ans plus tard, sa mère meurt et il est confié aux soins d’une tante. Frêle, de toute petite taille, souvent malade, inculte et presque analphabète, Alfred prend la route des États-Unis, où il exerce divers métiers qui ne lui conviennent pas. Revenu au pays en 1867, le curé de Saint-Césaire, la paroisse où il a grandi, le prend sous son aile et le fait entrer dans la congrégation de Sainte-Croix, le présentant comme un « saint ». Après un noviciat rallongé, la congrégation décide de garder chezelle cet étrange personnage, qui prend le nom de frère André. En février 1874, à vingt-huit ans, il fait sa profession perpétuelle.

On le nomme portier du collège. Plus tard, il en fera une blague, disant qu’à son arrivée dans la communauté on lui a « montré la porte » et qu’il l’a gardée durant presque quarante ans. Dans les faits, il est l’homme à tout faire, et fait notamment office d’infirmier avec les collégiens. C’est ainsi que sa renommée de thaumaturge commence à se répandre : pauvres et malades du quartier viennent lui réclamer des soins. Frère André prie avec eux, leur remet une médaille de saint Joseph, quelques gouttes de l’huile d’olive qui brûle devant la statue du saint, dans la chapelle du collège, et leur conseille de s’en frictionner avec confiance. Nombre d’entre eux s’en déclarent guéris.

Face à l’afflux et aux critiques qui commencent à poindre, la direction du collège lui demande d’aller pratiquer ses guérisons dans l’abri du tramway situé en face. Finalement, frère André, qui emmène toujours les gens prier devant une statue de saint Joseph dans une niche à proximité, demande à pouvoir construire un petit oratoire. On lui accorde l’autorisation, et les dons, en argent et en nature, affluent. En 1904, le sanctuaire est inauguré. À quatre reprises, il doit être agrandi tant le nombre de pèlerins grandit. À la fin, en 1913, la décision est prise de construire un vaste sanctuaire à saint Joseph. Ce qui deviendra l’une des plus grandes églises du monde est bâti en plusieurs étapes, pour être achevé seulement en 1967. C’est l’oratoire Saint-Joseph à Montréal, devenu le centre mondial de la dévotion au père putatif du Christ.

Le message de frère André reste très simple : prier Dieu, notamment par l’intercession de saint Joseph, aimer son prochain et le soulager de sa souffrance autant que possible.

En 1937, frère André trépasse : durant une semaine, plus d’un million de personnes défileront devant le corps du petit frère guérisseur pour le remercier et l’honorer.

Le long processus menant à sa canonisation débute peu après sa mort, en 1940. Il n’aboutit cependant qu’en 2010. En cause, les calomnies répandues sur le compte du « frotteur » comme l’appelaient les méchantes langues, lui reprochant d’abuser de l’huile d’olive pour ses guérisons. C’est l’archevêque de Montréal qui constitue logiquement un tribunal ecclésiastique pour étudier le cas. En 1960, la cause est introduite à Rome par Jean XXIII. On fait ouvrir son tombeau et on trouve le corps momifié et intact.

Après la reconnaissance d’un premier miracle – la guérison inexplicable du cancer du foie dont souffrait un Américain, monsieur Audino –, frère André est béatifié par Jean-Paul II en 1982. Ce ne sont pas moins de dix millions de personnes qui signent au fil des ans des pétitions pour obtenir sa canonisation, laquelle réclame un second miracle selon la loi de l’Église.

En 1999, un enfant de dix ans (la famille a réclamé l’anonymat) est renversé par une voiture : il souffre de deux fractures du crâne et une d’hémorragie cérébrale interne. Il est plongé dans un coma profond durant trois semaines, et l’on s’attend à une issue fatale. Mais au moment même où, à l’oratoire Saint-Joseph, un membre de la famille demande à frère André sa guérison, l’enfant sort du coma et se rétablit ensuite complètement. Une importante analyse de ce cas de guérison inexpliquée est réalisée par des médecins et spécialistes qui fournissent un rapport de huit cents pages.

Le 17 octobre 2010, le pape Benoît XVI canonise frère André, faisant de lui – seulement – le second saint québécois.

Jacques de Guillebon est essayiste et journaliste. Il collabore notamment à la revue catholique La Nef.


Aller plus loin :

L’explication des différentes étapes d’un procès en canonisation et le cas de celui du frère André, sur le site Patrimoine immatériel religieux du Québec.


En savoir plus :

  • Sur le site du diocèse de Montréal, l’article qui présente « Le miracle qui a mené à la canonisation du frère André ».
  • Micheline Lachance, Le Frère André : l’histoire de l’obscur portier qui allait accomplir des miracles, Montréal, Les Éditions de l’Homme, réédition 2010.
Partager cette raison

LES RAISONS DE LA SEMAINE