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TOUTES LES RAISONS DE CROIRE
Les mystiques
n°214

Foligno (Ombrie, Italie)

1248 – 1309

Sainte Angèle de Foligno et « dame pauvreté »

Venue au monde dans un milieu favorisé au XIIIe siècle, en Italie, Angèle change radicalement de vie vers quarante ans, réalisant qu’elle a trop longtemps négligé Dieu et les sacrements. Elle a une vision de saint François d’Assise, mort une vingtaine d'années avant sa naissance, et accepte de consacrer sa vie au Christ qui se manifeste aussi à elle. Elle donne tout ce qu’elle possède et est admise chez les Franciscaines en 1291. Angèle rend son âme à Dieu en 1309, sans jamais avoir interrompu son aide aux malades et aux nécessiteux. Elle est fêtée le 4 janvier.

© Unsplash / Chase Kennedy
© Unsplash / Chase Kennedy

Les raisons d'y croire :

  • La vie d’Angèle de Foligno est parfaitement connue, rapportée par son père spirituel, frère Arnaud, dans le Livre de la bienheureuse Angèle de Foligno. La deuxième partie du Livre, celle des enseignements, est constituée de lettres, de documents doctrinaux, de textes dictés directement par la sainte, et de révélations mystiques.
  • La conversion d’Angèle, définitive et totale, est également radicale, à l’image de saint François d’Assise : à quarante ans, elle abandonne sa position sociale, et, au désarroi de sa famille, distribue ses biens matériels aux indigents.
  • A priori, sa conversion ne lui cause qu’ennuis et reproches : aucun motif psychologique, conscient ou inconscient, n’est susceptible d’expliquer un tel renversement des valeurs et un si brusque engagement dans un genre de vie inconnu d’elle jusqu’à ses trente-sept ans.
  • Sa rencontre avec frère Arnaud, qui sera son confesseur et l’aidera dans son épanouissement spirituel, est providentielle : elle croise ce prêtre franciscain sur la route entre Assise et Foligno, le lendemain précisément de sa première vision de saint François.
  • Angèle mène une existence mystique jalonnée de visions, d’extases, d’apparitions, de locutions intérieures. Mais elle n’est en rien une « illuminée », une « extatique », ou une « déséquilibrée ». C’est au contraire une femme douée d’une solide expérience humaine, menant une vie sociale riche fondée sur la charité : soins aux lépreux, secours des nécessiteux, etc.
  • Sachant que la vie chrétienne consiste avant toute chose à imiter Jésus, elle garde une extrême prudence à l’égard des phénomènes extraordinaires, n’en parlant qu’à son confesseur, qui lui accorde une totale confiance.
  • Aucun des multiples messages recueillis par Angèle ne présente la moindre erreur doctrinale. Son humilité et son obéissance sont infaillibles : jusqu’à son dernier souffle, elle n’a jamais fait le moindre cas des révélations privées qu’elle reçoit de Dieu, s’en remettant totalement aux autorités ecclésiastiques.
  • « Vrai ange sur terre » (Ubertin de Casale), la pauvreté dont elle témoigne, loin de se résumer à de vagues promesses ou de faux engagements, est une voie spirituelle féconde, concrète, incarnée, comme un état de vie de Jésus.

  • Angèle a été béatifiée par l’Église en 1701, puis canonisée en 2013 par le pape François, mais elle avait été reconnue comme une mystique exceptionnelle dès le début du XIVe siècle par le pape Clément V. Lors de l’audience générale du 13 octobre 2010, le pape Benoît XVI revient sur sa vie en des termes très élogieux, indiquant qu’elle atteint, dans une prière constante, les sommets de la vie mystique.

Synthèse :

Née dans une famille de la noblesse d’Ombrie (Italie), à côté d’Assise, de tradition catholique complètement étrangère à la mystique, Angèle mène d’abord une vie mondaine marquée par l’aisance et les plaisirs divers. Mariée et mère de famille, elle organise son quotidien en promenades, réceptions, lectures et frivolités diverses.

Au cours de l’année 1285, elle prend conscience que « quelque chose » ne tourne pas rond, que le vernis de son existence est en train de craquer, qu’elle perd son temps dans des activités futiles ; en un mot, que l’accessoire est devenu l’essentiel. Elle se sent vaniteuse et, pour la première fois, afin de se racheter, elle veut communier. Comme la tradition l’exige, elle se confesse à un prêtre d’un couvent près de chez elle. Mais ce jour-là, pensant qu’elle a commis une infinité de péchés depuis sa jeunesse, elle sélectionne soigneusement ceux qu’elle avoue. Puis elle se rend à la messe et communie.

La nuit suivante, elle ne trouve pas le sommeil, tourmentée par l’idée qu’elle a commis une communion sacrilège. Brusquement, une lumière extraordinaire illumine toute sa chambre. En son centre, elle voit la silhouette d’un homme portant l’habit franciscain. Elle s’approche, malgré sa peur, et découvre que ses mains et ses pieds sont transpercés… : ce sont les stigmates de saint François d’Assise ! Le saint lui fait signe et lui demande de le suivre dans la voie du dépouillement. Il lui explique que, malgré sa confession défaillante, elle a trouvé grâce devant Dieu. Puis la vision disparaît. Dans le for intérieur d’Angèle, c’est un séisme. Dorénavant, plus rien ne sera comme avant. Sa conversion est en marche.

Le lendemain, elle court au sanctuaire de saint François à Assise pour rendre grâce. Sur le chemin du retour, elle fait la rencontre d’Arnaud, un prêtre franciscain qui va devenir son confesseur, et grâce auquel nous connaissons les écrits et les expériences extraordinaires de la sainte. Quelques semaines plus tard, elle prend l’engagement, devant le crucifix de sa chambre, de la chasteté et d’une « fidélité sans faille ». « Que dois-je faire ?», se demande-t-elle alors. À cette époque, elle est devenue veuve ; elle accepte de suivre Jésus jusqu’au bout.

Elle vit désormais toujours dans le monde, mais déjà hors du monde. Son attachement affectif et psychologique aux personnes et aux biens matériels diminue de façon continue. Elle ne cherche plus à séduire ni à conserver son rang social. Elle se rend compte qu’elle se détache peu à peu de tout cela, avec joie et bonheur. Le temps qui passe et l’avenir ne lui font plus peur : elle a une confiance aveugle dans la providence divine. Prière, lecture de la Bible, pratique des sacrements, aide des pauvres et des malades, sa vie quotidienne ressemble à celle d’une chrétienne exemplaire. En 1291, elle devient membre d’un tiers ordre franciscain, dont les règlements l’astreignent à suivre chaque jour les offices liturgiques successifs.

Le Christ se manifeste à elle sous la forme de visions et de locutions, qu’elle prend soin de communiquer à son confesseur. Elle voit Jésus sous différents aspects (crucifié, dans sa gloire, etc.) et connaît des ravissements mystiques. Après avoir donné son argent et ses biens aux pauvres, elle est prise pour une « folle » par sa famille et son entourage nobiliaire – jugement qui n’entame en rien son choix définitif de servir Jésus dans la personne des démunis. Elle soigne en particulier des lépreux, personnes non seulement incurables à cette époque, mais aussi véritables parias de la société.

C’est à cette époque qu’elle commence à parler de son itinéraire intérieur – une montée vers Dieu en trente-cinq étapes ou « pas » (huit premiers, vingt suivants et sept derniers), qu’elle expérimente en gardant toujours assez de distance pour en faire une analyse claire et complète.

Ses visions, d’abord corporelles au début de sa conversion, se font « imaginatives », puis « intellectuelles » : Angèle ne voit ni formes, ni couleurs, ni même les physionomies des êtres célestes, mais elle sait qu’ils sont à ses côtés, et qu’elle est unie à eux, au-delà de toutes modalités sensibles. Un Jeudi saint, elle fait une expérience capitale : le Christ lui apparaît, avec les plaies de sa Passion. Son air est d’une grande tristesse. Il lui dit : « Ma fille, ce n’est pas pour rire que je t’ai aimée ! » Cette vision lui procure une paix ineffable pendant les années qui lui restent à vivre.

Angèle rend son âme à Dieu en 1309, sans jamais avoir interrompu son aide aux malades et aux nécessiteux. Comme la croix est faite du croisement de deux poutres, sa foi unifie mystique (partie verticale) et charité (partie horizontale).

Patrick Sbalchiero


Au-delà des raisons d'y croire :

Plus de sept siècles après sa disparition, Angèle continue d’exercer une solide influence dans le monde catholique, et, au-delà de toutes confessions, sur nombre de personnes en recherche de Dieu.


Aller plus loin :

Michel Cazenave, Angèle de Foligno, Paris, Albin Michel, 2007.


En savoir plus :

  • Angèle de Foligno, Le Livre des visions et instructions, Paris, Le Seuil, 1991.
  • Jean-Jacques Antier, « Angèle de Foligno, vers 1250 – 1309 », dans Patrick Sbalchiero (dir.), Dictionnaire des miracles et de l’extraordinaire chrétiens, Paris, Fayard, 2002, p. 24-25.
  • Michel Cazenave, « Angèle de Foligno, bienheureuse, tertiaire franciscaine (Foligno, 1248 – janvier 1309) », dans Audrey Fella (dir.), Les Femmes mystiques. Histoire et dictionnaire, Paris, Robert Laffont, 2013, p. 103-107.
  • Sur le site Internet du Vatican, l’audience générale de Benoît XVI du 13 octobre 2010 sur Bienheureuse Angèle de Foligno.
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