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TOUTES LES RAISONS DE CROIRE
Les Apôtres
n°3

Jérusalem

62 ap. J.-C.

Découvrez qui était le « frère de Jésus » 

L’apôtre Jacques le Mineur (ou Jacques le Juste) a joué un rôle capital dans la première Église. Il était, selon la formule araméenne, « frère de Jésus », c’est-à-dire l’un de ses cousins directs et, comme lui, prince de Juda, de la descendance de David. Il s’est distingué par une foi et une piété si fortes qu’il a marqué la tradition chrétienne autant que la tradition juive. Si le Talmud le cite de manière polémique, son martyre en 62 (il fut précipité du pinacle du Temple et achevé à coups de bâton) est rapporté par Eusèbe de Césarée et par Flavius Josèphe qui précise que sa mise à mort injuste a provoqué le renvoi du grand prêtre juif d’alors, Annan Ben Annan, et qu’elle fait partie des actes iniques qui ont conduit à la destruction de Jérusalem.

ht St Jacques le Mineur, Apôtre, St Jude Thadée, Apôtre (BM 1855,0609.66). © Public Domain
ht St Jacques le Mineur, Apôtre, St Jude Thadée, Apôtre (BM 1855,0609.66). © Public Domain

Les raisons d'y croire :

  • Jacques le Mineur a été un homme remarquable, d’une grande piété, surnommé « le Juste » en témoignage de la mémoire marquante qu’il a laissée dans les mondes juif et chrétien, à la fois comme apôtre et martyr.
  • Jacques se souciait tout spécialement de ses frères du monde juif pour lesquels il priait sans cesse au Temple.
  • Comme tous les apôtres (à l’exception de Jean), il s’est enfui à la Passion et n’était pas au pied de la Croix, mais il a complètement changé d’attitude après la Résurrection pour devenir un témoin inflexible, que rien ni personne ne pouvait faire renier.
  • Comme tous les martyrs, son témoignage est éloquent : arrivé à un âge avancé, après 32 ans d’épiscopat sur le siège de Jérusalem, il a été invité à donner sa position sur le Christ. La force de ses paroles a été jugée inacceptable par certains de ses auditeurs qui ont réagi en le précipitant du pinacle du Temple, avant de l’achever à coups de bâton. Jacques s’est éteint dans la paix et en pardonnant à ses bourreaux, méritant pour toujours le titre de « Juste ».

Synthèse :

Jacques le Mineur, fils d’Alphée (lui-même apparenté à Joseph, père putatif du Christ, sans doute par Cléophas, son père) et de son épouse Marie, prince de Juda, de la descendance de David, était aussi le grand frère de Jude Thaddée. Tous deux étaient des cousins de Jésus et furent « appelés » (Mt 10, 1) à faire partie des douze apôtres que le Christ a « choisis » (Jn 6, 70), « institués » (Mc 3, 14) et « établis » (Mc 3, 16) « pour être avec lui » (Mc 3, 14) pendant ses trois années de vie publique, afin qu’ils puissent être « ses témoins » (Lc 24, 48) et le fondement de l’Église. Jacques fut effectivement un témoin éloquent du Christ par son témoignage, sa piété, son martyre et son épître. On lui attribue aussi le Protévangile de Jacques, très respecté dans les Églises d’Orient. Le texte exalte la sainteté et la virginité de Marie Mère de Jésus, évoque sa Présentation au Temple, ainsi que des traditions antérieures aux Évangiles sur l’enfance de Jésus.

Hégesippe mentionne la « très grande piété » de Jacques, « consacré à Dieu », qui « passait ses jours dans le Temple de Jérusalem à intercéder pour son peuple », qui « s’agenouillait tant de fois pour prier que la peau de ses genoux était endurcie comme la plante des pieds. C’est en raison de cet état de justice extraordinaire et constante qu’il fut appelé juste » et précise : « Après que Jacques le Juste eut rendu son témoignage [mourut] comme le Seigneur et pour la même doctrine, le fils de son oncle, Siméon, fils de Cléophas, fut établi évêque : tous le préférèrent comme deuxième [évêque] parce qu’il était cousin du Seigneur » (cité par Eusèbe de Césarée dans Histoire ecclésiastique, IV, 22, 4).

Saint Jérôme ajoute que Jacques, entièrement consacré à Dieu et non marié, fut en telle révérence et sainteté au peuple, que c’était à qui pourrait toucher la frange de son vêtement.

Jacques est présenté dans les Actes (12, 17 ; 15, 13 ; 21, 18) comme une figure éminente de la première Église. Dans les nombreux textes chrétiens qui relatent la façon dont les pays à évangéliser ont été répartis entre les douze apôtres, tandis que tous reçoivent des pays éloignés, Jacques se voit confier le territoire de la Palestine. Or, cela correspond à la fonction et à l’action de Jacques le Juste, qui sera pendant plus de 30 ans le chef de l’Église de Jérusalem, et qui ne sera jamais décrit comme exerçant une mission d’évangélisation à l’étranger. Les Actes rapportent son rôle important dans ce qu’on appellera plus tard le « premier concile de Jérusalem » (Ac 15, 6-31). Paul parle de Jacques,« frère du Seigneur », comme l’un des deux seuls apôtres qu’il a rencontrés lors de sa première venue à Jérusalem (Ga 1, 19) et le désigne, avec Pierre et Jean, comme l’une des trois « colonnes de l’Église » (Ga 2, 9). Clément d’Alexandrie précise très justement : « Il y avait deux Jacques : le Juste jeté par-dessus le parapet [du Temple] et battu à mort avec un bâton du fouleur, et celui qui fut décapité » (c’est-à-dire Jacques de Zébédée, frère de l’apôtre Jean l’évangéliste ; cf. Ac 12, 2).

Il est frappant de constater le rayonnement de Jacques qui va jusqu’à être mentionné dans le Talmud des juifs, mis par écrit quelques siècles plus tard. Il y est désigné par « Jacob le min » (« Jacques l’hérétique ») ou « Jacob de Kfar Sikhnaya » (un village), puis présenté tour à tour comme un polémiste, un missionnaire qui agit au nom de Jésus de Nazareth, mais aussi un guérisseur. En effet, Jésus avait donné autorité à ses disciples pour soigner les malades, et ceux-ci avaient ainsi pu en guérir en son nom : ce fait était bien connu du Talmud et figurait dans cet écrit très hostile aux chrétiens.

La mort de Jacques « frère de Jésus » est aussi rapportée dans la tradition juive par Flavius Josèphe dans ses Antiquités juives au livre XX, chapitre 9 (197-203) :

« Ayant appris la mort de Festus, l’empereur envoya Albinus en Judée comme procurateur. Le roi enleva le pontificat à Joseph le grand prêtre et donna la succession de cette charge au fils d’Annan, nommé lui aussi Annan. On dit que le vieil Annan fut très heureux, car il avait cinq fils qui tous eurent la chance d’être grands prêtres de Dieu et il avait lui-même rempli cette charge pendant très longtemps ; or, cela n’arriva jamais à aucun autre de nos grands pontifes. Arian le jeune qui, comme nous l’avons dit, reçut le grand pontificat, était d’un caractère fier et d’un courage remarquable ; il suivait, en effet, la doctrine les sadducéens, qui sont inflexibles dans leur manière de voir si on les compare aux autres Juifs, ainsi que nous l’avons déjà montré. Comme Annan était tel et qu’il croyait avoir une occasion favorable parce que Festus était mort et Albinus encore en route, il réunit un sanhédrin, traduisit devant lui Jacques, frère de Jésus appelé le Christ, et certains autres, en les accusant d’avoir transgressé la loi, et il les fit lapider. Mais tous ceux des habitants de la ville qui étaient les plus modérés et les plus attachés à la loi en furent irrités et ils envoyèrent demander secrètement au roi d’enjoindre à Annan de ne plus agir ainsi, car déjà auparavant il s’était conduit injustement. Certains d’entre eux allèrent même à la rencontre d’Albinus qui venait d’Alexandrie et lui apprirent qu’Annan n’avait pas le droit de convoquer le sanhédrin sans son autorisation. Albinus, persuadé par leurs paroles, écrivit avec colère à Annan en le menaçant de tirer vengeance de lui. Le roi Agrippa lui enleva pour ce motif le grand pontificat qu’il avait exercé trois mois et en investit Jésus, fils de Damnaios. »

Eusèbe de Césarée décrit également les circonstances dramatiques de la mort de Jacques et attribue à Flavius Josèphe une autre citation, qui va jusqu’à lier la mort de Jacques le Juste en 62 ap. J.-C. à la ruine et à la destruction de Jérusalem, en 70, quelques années plus tard : « Jacques, le frère de Jésus appelé le Christ, était vénéré des Judéens comme un homme juste ; il était célèbre pour son ascétisme et sa piété envers Dieu. À son sujet, on raconte que les Judéens furent tellement troublés par sa mort que l’empire romain, qui avait alors en charge la Judée, subit bientôt les effets de la colère divine. Peu de temps après, les Romains, venus pour réprimer une rébellion, prirent la ville, incendièrent le Temple et détruisirent la ville. Ce fut la fin de la nation juive, comme le prédit Moïse, car il avait dit aux Juifs que, s’ils s’égaraient dans leur conduite, ils subiraient de grands malheurs. Ces événements ont eu lieu sous le règne de Vespasien et de son fils Titus, comme je l’ai raconté dans mes livres sur la Guerre » (cf. Histoire ecclésiastique, livre II, chapitre 23, paragraphe 22).

Jacques est l’auteur d’une épître qui, dans le Nouveau Testament, occupe la première place parmi ce qu’on appelle les « Lettres catholiques », c’est-à-dire qui ne sont pas destinées à une seule Église particulière. Il ne s’y présente pas comme « frère du Seigneur », mais comme « serviteur de Dieu et du Seigneur Jésus » (Jc 1, 1), et a un discours vigoureux invitant à vivre sa foi de façon très concrète : « Devant Dieu notre Père, un comportement religieux pur et sans souillure, c’est de visiter les orphelins et les veuves dans leur détresse » (Jc 1, 27). Il se montre très sévère contre les riches qui laissent dormir leur argent sans secourir les pauvres et les nécessiteux (Jc 5, 1-6) et affirme que « de même que le corps qui ne respire plus est mort, la foi qui n’agit pas est morte » (Jc 2, 26).

Depuis le VIe siècle et le pape Pélage Ier, la plupart de ses reliques sont, avec celles de l’apôtre Philippe, conservées dans la crypte de la basilique des Saints-Apôtres à Rome.

Olivier Bonnassies


Au-delà des raisons d'y croire :

La mémoire de Jacques, « témoin du rapport inséparable qui lie le christianisme à la religion juive comme à sa matrice éternellement vivante et valable » (Benoît XVI), nous rappelle l’importance des racines juives de la foi chrétienne (cf. l’article « Pourquoi le judaïsme nous est-il nécessaire pour adorer Jésus-Christ ? »).


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