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Reliques
n°631

Jérusalem, Rome et Sicile

1185-1220

La procession du reliquaire de saint Ange à Licata

Après le siège et la prise de Jérusalem, en 1187, qui achèvent la conquête d’une partie de la Palestine par Saladin, le « royaume de Jérusalem » perdure, bien que réduit, jusqu’à la chute de Saint-Jean-d’Acre, en 1291. Mais la perte de la ville de Jérusalem oblige déjà au XIIe siècle nombre de chrétiens latins à regagner l’Europe pour éviter la mort ou la conversion forcée. Ange fait partie d’un groupe de religieux qui, depuis le mont Carmel, arrivent en Sicile. Il y meurt martyr le 5 mai 1220 à Licata, tué par des hommes impies. Son culte se développe aussitôt et une église est construite sur les lieux du martyre, où les foules se pressent pour demander au saint protection et assistance, tant matérielle que spirituelle.

Saint Ange avec la croix, l'épée et la palme du martyr. Antonio de Pereda (vers 1667) / © CC0, wikimedia.
Saint Ange avec la croix, l'épée et la palme du martyr. Antonio de Pereda (vers 1667) / © CC0, wikimedia.

Les raisons d'y croire :

  • Dès le XIIe siècle, des hommes s’inspirant de la vie contemplative du prophète Élie viennent vivre en ermites dans les grottes du mont Carmel. Le patriarche latin de Jérusalem, saint Albert Avogadro, leur donne une règle de vie en 1209. C’est l’acte fondateur de l’ordre des Frères de Notre-Dame du Mont-Carmel, appelés communément « Carmes ». Saint Ange, comme ses compagnons, a dévoué sa vie au Christ en renonçant au mariage, aux joies de fonder une famille, à la propriété privée et aux envies personnelles de la vie quotidienne pour suivre celui-ci par une vie chaste, pauvre et consacrée par l’obéissance aux supérieurs religieux.
  • Le Catalogue des saints, qui date de la fin du XIVe ou du début du XVe siècle, stipule qu’il est mort en Sicile, tué à Licata (sur la côte au sud-est d’Agrigente, entre Agrigente et Gela) par des « infidèles impies », au cours de la première moitié du XIIIe siècle. Parce qu’on l’a aussitôt révéré comme un martyr, ce qui est gage de la réalité de l’événement, une église a été érigée en son honneur sur le lieu de sa mort, et son corps a été placé dans un autel de l’église.

  • Les habitants de Licata attribuent à saint Ange d’avoir préservé la ville de l’attaque des Turcs, en 1533. La dévotion populaire lors de la procession en l’honneur de saint Ange, qui a lieu tous les 5 mai, illustre cet épisode : l’urne reliquaire, entourée de quatre grands cierges fichés sur d’immenses candélabres mécaniques, pèlerine à travers les rues. Parvenus à la via Principe di Napoli, les habitants cèdent l’urne aux marins. Ces derniers la portent en courant, tenant en main des cierges allumés, en souvenir des Turcs qui ont été contraints de partir.
  • En 1625, afin de célébrer la fin de l’épidémie de peste, obtenue grâce aux prières adressées au saint par les habitants, une fête additionnelle est instituée au mois d’août. Elle est toujours célébrée. À cette occasion, l’église est de nouveau agrandie (elle l’avait déjà été en 1564). Le 4 mai 1626, saint Ange est également proclamé patron de Palerme.
  • En 1657, la peste ravage la vice-royauté de Naples. Les habitants de Licata se tournent à nouveau vers saint Ange et implorent sa protection. Parce que la ville est épargnée, ils construisent une nouvelle église, dédiée à Notre Dame du Mont-Carmel (Santa Maria del Carmine), pour accueillir les reliques du saint religieux. Le 15 août 1662, l’urne est transportée dans l’église actuelle.

Synthèse :

Un certain Henoch a rédigé et diffusé une biographie d’Ange. Les erreurs topographiques et chronologiques contenues dans son œuvre montrent qu’il n’a pas lui-même vécu à Jérusalem au XIIIe siècle. Il s’agit, selon toute probabilité, d’un Sicilien qui a écrit dans la première moitié du XVe siècle et qui a utilisé des sources historiques antérieures pour écrire la vie de saint Ange.

Selon cette biographie, Ange naît de parents hébreux, du nom de Jesse et Maria, qui habitent à Jérusalem. Ils se convertissent au christianisme à la suite d’une manifestation de la Sainte Vierge. La Vierge du Carmel leur annonce la naissance d’Ange et de son frère Jean. Après leur mort, le patriarche Nicodème éduque les deux frères jusqu’à ce qu’ils atteignent leur dix-huitième année, puis ces derniers rejoignent les carmes du couvent Sainte-Anne, près de la Porte Dorée de Jérusalem. Après une année de probation, Ange et Jean se rendent au mont Carmel. Là, ils vivent dans un ascétisme rigoureux pendant dix ans, consacrant leurs journées à la prière silencieuse.

Ange imite bientôt les pouvoirs miraculeux de ses pères, les prophètes Élie et Élisée. À vingt-huit ans, il est ordonné prêtre à Jérusalem. Puis il se retire au désert, où il demeure cinq années dans la prière et la pénitence. Le Christ, dans une vision, lui ordonne de se rendre en Sicile pour travailler à la conversion d’un chevalier du nom de Bérenger, qui vit dans le péché avec sa sœur depuis longtemps. Trois enfants sont les fruits de cet inceste.

Ange a dû exercer des responsabilités importantes au sein de l’ordre, puisque Nicholas Processi, un bénéficiaire de Saint-Jean-de-Latran, parle vers 1370 d’une visite d’Ange à Rome. On sait aussi qu’il a été chargé par le patriarche d’Alexandrie, Athanase de Chiaramonte, de porter des reliques jusqu’en Italie, probablement au frère du patriarche, Frédéric de Chiaramonte. Comme Ange prie pour que le Seigneur protège la ville sainte, Ange est divinement informé de l’avenir de Jérusalem et de la chrétienté de la Terre sainte.

En 1219, il part pour la Sicile sur un navire génois. Non loin du terme du voyage, son bateau est attaqué par des galères sarrasines dont, à sa prière, ses compagnons et lui sont délivrés. Parvenu à Civitavecchia (le port de Rome), Ange remet les reliques à Frédéric de Chiaramonte, puis marche jusqu’à Rome, où il rencontre saint François et saint Dominique. Il prédit à saint François qu’il sera marqué par les stigmates. Ce dernier lui annonce son martyre précoce. Puis Ange regagne la Sicile. À Palerme, il est l’hôte des moines basiliens de Sainte-Marie-de-la-Grotte, où il prêche. Puis il se rend à Agrigente. Aux bains de Cafalà, il guérit des lépreux. Il prêche à Agrigente, puis gagne Licata. Là, Ange tente avec persévérance de convertir Bérenger, d’abord en s’entretenant avec lui, puis, devant l’échec de ses démarches, en le reprenant en public. Le chevalier, exaspéré de la conversion de sa sœur, ne veut rien entendre. Il blesse mortellement Ange de cinq coups d’épée le 5 mai 1220, alors que le religieux prêche près de l’église Saints-Philippe-et-Jacques, au bord de la mer.

Avant de rendre l’âme, le saint exhorte ceux qui l’entourent à ne pas le venger. La fontaine qui se trouve à droite de l’église est réputée avoir jailli sur le lieu de son martyre.

Les reliques du saint carme sont placées dans une église qui n’appartient pas à l’ordre. Aussi les frères carmes demandent-ils en 1457 au pape Calixte III la permission d’annexer l’église à leur couvent. Mais, malgré l’accord du pape, il faudra attendre 1605 pour y parvenir. En 1486, les restes de saint Ange sont extraits du cercueil de bois et placés dans une urne d’argent. Le 5 mai 1623, jour de la fête solennelle du saint, ils sont introduits dans une urne plus précieuse encore où l’on peut toujours les vénérer aujourd’hui.

Docteur en philosophie, Vincent-Marie Thomas est prêtre.


Aller plus loin :

Ludovico Saggi, O. Carm., Sant’Angelo di Sicilia ; studio sulla vita, devozione, folklore, Rome, Institutum Carmelitanum, 1962, 360 p.


En savoir plus :

  • Marco Papasidero, Miracula et Benefitia: Malattia, taumaturgia e devozione a Licata e in Sicilia nella prima età moderna. Con l’edizione del processo sui miracoli di sant’Angelo (1625-1627), Rome, Edizioni Carmelitane, 2021, 542 p.
  • Joachim Smet, O. Carm., I Carmelitani. Storia dell’Ordine del Carmelo, vol. 1 : Dal 1200 ca. fino al Concilio di Trento, Rome, Institutum Carmelitanum, 1989, 564 p.
  • Ludovico Saggi présente une courte biographie en anglais intitulée : Angelus of Sicily, Saint, Martyr, Priest, qui est disponible en ligne.
  • La paroisse et le sanctuaire des carmes de Licata présentent (en italien) une description et des images de la châsse reliquaire du saint.
  • L’article du site Internet Correspondance Européenne : « Sainteté : les Martyrs de la Loi naturelle, saint Ange et saint Stanislas ».
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