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TOUTES LES RAISONS DE CROIRE
Les Apôtres
n°326

Judée et Éthiopie

Ier siècle

Saint Matthias, devenu apôtre après la mort de Jésus

Matthias faisait partie des soixante-dix disciples qui ont suivi le Christ durant sa vie publique. Comme tel, il a assisté à ses prédications et aux miracles qu’il accomplissait et qui authentifiaient son message. Après la mort de Judas, il fut choisi par le sort pour remplacer ce dernier. Il reçut par la suite de saint Pierre, chef des apôtres, la charge d’une région à évangéliser : ce fut peut-être, après quelque temps en Judée, l’Éthiopie. Il mourut martyr, vers l’an 60 de notre ère.

© Shutterstock, Nadezhda Bolotina.
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Les raisons d'y croire :

  • L’évêque Eusèbe de Césarée (né vers 265 et mort en 339) compose son Histoire ecclésiastique à partir d’une abondante documentation. Il y évoque plusieurs fois le personnage de saint Matthias. Au chapitre qu’il consacre aux disciples de Jésus-Christ, il rapporte que, d’après Clément d’Alexandrie, Matthias appartenait au groupe des soixante-dix disciples (livre I, ch. 12, 3). Eusèbe fait référence à un ouvrage aujourd’hui perdu de Clément, prêtre d’Alexandrie (né vers 150 et mort vers 210), dont le titre est Livre des hypotyposes.
  • Saint Luc rédige une chronique des actions des apôtres, qui commence après que le Christ les a quittés le jour de l’Ascension pour remonter auprès de son Père. Ce récit historique s’intitule les Actes des Apôtres. Au premier chapitre de l’œuvre, saint Luc raconte comment Matthias est choisi, par tirage au sort afin que la volonté divine, qui a déjà appelé les onze autres apôtres, désigne aussi celui qui devait remplacer Judas. Ce dernier s’était donné la mort après avoir désigné Jésus-Christ aux soldats venus l’arrêter, pour le prix de trente pièces d’argent.
  • Eusèbe, dans son Histoire ecclésiastique, se fait l’écho du fait historique de l’élection de Matthias (livre II, ch. 1, 1).
  • Le nom de saint Matthias figure au canon de la messe, non dans la première liste des apôtres, mais dans la seconde, celle des martyrs, après le Memento des défunts. Le canon a été composé à partir des traditions antiques, vers le IVe siècle.
  • On peut souligner que Matthias rejoint les onze apôtres après la mort de Jésus sur la croix. Il faut qu’il ait été certain de la résurrection de Jésus, car, sinon, se lancer dans une telle entreprise n’a aucun sens. Il est un des témoins de la résurrection du Christ et donne sa vie pour faire connaître son message.

Synthèse :

Après l’Ascension du Christ, les apôtres se retrouvent seuls. Jésus-Christ leur a promis l’assistance de l’Esprit Saint, Esprit divin de vérité et de force qui unit le Père et le Verbe au sein de la Très Sainte Trinité. Pour préparer sa venue, saint Pierre, inspiré divinement, décide de remplacer Judas afin que le collège des apôtres soit de nouveau complet. Depuis la mort de Judas, en effet, ils ne sont plus douze mais onze. Or le nombre douze, dans la Sainte Écriture qui raconte l’histoire passée du peuple de Dieu, mais annonce aussi l’avenir de l’Église, est un nombre sacré. Ainsi y eut-il douze patriarches, tous fils de Jacob (Gn 49), qui furent les pères des douze tribus (Josué, chapitres 13 à 22). Avec l’avènement de l’Église, fondée par Jésus-Christ, les apôtres deviennent les successeurs spirituels des patriarches. Ils sont désormais les gardiens des peuples de la terre, lesquels sont tous appelés à connaître, par la prédication des apôtres, la bonne nouvelle du salut : ils sont en effet les premiers évêques (« épiscopes » c’est-à-dire ceux qui veillent au bien spirituel des peuples que Jésus-Christ leur a confiés). On comprend donc, pour ces raisons historiques, symboliques et sotériologiques (liées au salut du monde) le souci de saint Pierre de remplacer Judas.

Les « onze » regagnent donc la salle du cénacle, où ils s’étaient tenus plusieurs fois avec leur Maître, à Jérusalem. Sous la conduite de saint Pierre et probablement avec le conseil de la Vierge Marie, ils se mettent en prière. Voici comment saint Luc, dans les Actes des Apôtres, rapporte les faits : « À leur arrivée, ils montèrent dans la chambre haute où ils se tenaient habituellement ; c’était Pierre, Jean, Jacques et André, Philippe et Thomas, Barthélemy et Matthieu, Jacques, fils d’Alphée, Simon le Zélote, et Jude, fils de Jacques. Tous, d’un même cœur, étaient assidus à la prière, avec des femmes, avec Marie, la mère de Jésus, et avec ses frères. En ces jours-là, Pierre se leva au milieu des frères qui étaient réunis au nombre d’environ cent vingt personnes, et il déclara : "Frères, il fallait que l’Écriture s’accomplît. En effet, par la bouche de David, l’Esprit Saint avait d’avance parlé de Judas, qui en est venu à servir de guide aux gens qui ont arrêté Jésus : ce Judas était l’un de nous et avait reçu sa part de notre ministère ; puis, avec le salaire de l’injustice, il acheta un domaine ; il tomba la tête la première, son ventre éclata, et toutes ses entrailles se répandirent. Tous les habitants de Jérusalem en furent informés, si bien que ce domaine fut appelé dans leur propre dialecte Hakeldama, c’est-à-dire "domaine du sang". Car il est écrit au livre des Psaumes : "Que son domaine devienne un désert, et que personne n’y habite", et encore : "Qu’un autre prenne sa charge". Or, il y a des hommes qui nous ont accompagnés durant tout le temps où le Seigneur Jésus a vécu parmi nous, depuis le commencement, lors du baptême donné par Jean, jusqu’au jour où il fut enlevé d’auprès de nous. Il faut donc que l’un d’entre eux devienne, avec nous, témoin de sa résurrection." »

Après avoir rapporté ce discours de l’apôtre Pierre, saint Luc continue son récit : « On en présenta deux : Joseph, appelé Barsabbas, puis surnommé "le Juste", et Matthias. Ensuite, on fit cette prière : "Toi, Seigneur, qui connais tous les cœurs, désigne lequel des deux tu as choisi pour qu’il prenne, dans le ministère apostolique, la place que Judas a désertée en allant à la place qui est désormais la sienne." On tira au sort entre eux, et le sort tomba sur Matthias, qui fut donc associé par suffrage aux onze apôtres » (Ac 1,13-26).

Saint Matthias n’a rien écrit. Eusèbe de Césarée évoque un « Évangile de Matthias » mais précise qu’il n’est pas seulement apocryphe (c’est-à-dire qu’il lui est faussement attribué), mais encore « absurde et impie » en raison des opinions contraires à la foi chrétienne qu’il présente (Hist. ecclés., livre III, ch. 25, 7). Clément d’Alexandrie rapporte « que l’on assure que Matthias enseignait... qu’il faut combattre les sens » et « augmenter les forces de l’âme par la foi et par la connaissance » (Stromates, III, 4, trad. Genoude, p. 226).

Dans son Synopsis, qui est un recueil de paroles et de portraits d’apôtres, de prophètes et de disciples du Sauveur, l’évêque Dorothée de Tyr note que saint Matthias est mort martyr en Éthiopie. Bien plus tard, le moine byzantin Nicéphore (historien et poète de la fin du XIIIe et début du XIVe siècle) se fait l’écho de cette tradition dans son Histoire ecclésiastique (livre II, ch. 40).

Les reliques du saint, transportées par sainte Hélène, sont vénérées à Rome en la basilique Sainte-Marie-Majeure, sous l’autel papal, ainsi que, peut-être, à Trèves, en l’église qui porte le nom de l’apôtre.

Docteur en philosophie, Vincent-Marie Thomas est prêtre.


Aller plus loin :

Saint Luc, Actes des Apôtres.


En savoir plus :

  • Clément d’Alexandrie, Stromates, Paris, Cerf, Sources chrétiennes no 608, 2020. L’œuvre est disponible en ligne dans l’édition parue à Paris, Sapia, 1839, trad. Genoude.
  • Eusèbe de Césarée, Histoire ecclésiastique. Paris, Cerf, Sources chrétiennes no 31, 2001, tome I : Livres I-IV, 440 p. Le texte de l’ouvrage est disponible en ligne dans la traduction d’Émile Grapin.
  • Nicéphore Calliste Xanthopoulos, Histoire ecclésiastique. Traduction française de 1578, à Paris. L’auteur évoque saint Matthias aux pages 30 et 52. Disponible en ligne.
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