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Corps conservés des saints
n°626

Mayenne (France)

1815 – 1847

La renommée inattendue de la discrète fermière Victoire Brielle

Jeune femme discrète de la campagne mayennaise, Victoire-Françoise Brielle laisse après sa mort en 1847 une réputation de piété et de charité. Prier Dieu et veiller aux besoins matériels et spirituels du prochain : voilà le programme de vie d’une chrétienne qui a consacré sa vie à Dieu tout en demeurant à la ferme familiale, où elle se montre industrieuse et dévouée. C’est la pratique des vertus évangéliques, vécue au quotidien, de manière toute simple, sous le regard de Dieu.

La chapelle Saint-Joseph, abritant le tombeau de Victoire Brielle. / © CC BY-SA 4.0, Xfigpower.
La chapelle Saint-Joseph, abritant le tombeau de Victoire Brielle. / © CC BY-SA 4.0, Xfigpower.

Les raisons d'y croire :

  • Victoire-Françoise Brielle a, somme toute, la vie très ordinaire d’une fermière du XIXe siècle. Il est très étonnant que l’on en connaisse tant de détails. C’est que son entourage a perçu qu’il s’agissait en vérité d’une vie hors norme, imprégnée de la présence de Dieu. Le jour de sa mort, le 29 avril 1847, l’abbé Lebreton, vicaire de Saint-Poix, confie après l’inhumation : « Je suis gai, j’ai enterré une sainte»

  • Obéissance, recueillement, joie paisible et réfléchie sont les traits de caractère de l’enfant. Tous ceux qui l’ont connue s’accordent alors à dire qu’on remarque en elle un ensemble de qualités au-dessus de son âge. Ses vertus grandissent au fil des années.
  • Elle se montre toujours d’une foi rayonnante qui édifie ses frères et sœurs aînés ou puînés. Sa piété est éclairée, nourrie de l’Évangile. Adulte, elle se confesse et communie tous les dimanches. Elle est présente à l’église dès cinq heures. Elle assiste aussi chaque jour à la messe en semaine, et y communie, ce qui est exceptionnel à l’époque. « Dieu est au cœur de la vie de Victoire et elle le rayonne autour d’elle », écrit un autre témoin.

  • Victoire connaît l’heure de sa mort. La semaine précédant son décès, comme elle apporte aux champs de l’eau aux ouvriers agricoles, selon l’habitude de la campagne, elle dit à l’un d’entre eux : « Je vous apporte à boire aujourd’hui ; dans huit jours, je ne vous en apporterai plus, je serai morte. » Elle meurt comme elle l’avait annoncé, dans sa trente-troisième année, alors qu’elle ne souffrait d’aucune maladie.

  • L’exhumation de sa dépouille, le 20 août 1866, pour renouveler la sépulture – selon l’usage rural de l’époque –, laisse apparaître un corps parfaitement conservé, d’une odeur agréable, alors que la terre du cimetière a favorisé la décomposition rapide des autres corps qui l’entourent. Le vicaire de la paroisse, Aimable Maulavé, rapporte alors : « Une figure parfaitement conservée… Les lèvres un peu serrées, laissant apercevoir des dents très blanches… Les cheveux bien en ordre sous un simple bonnet… Les traits, nullement contractés, donnaient à cette figure un air presque souriant… avec, à l’annulaire droit, comme une femme non mariée, un simple anneau d’or. »

  • On ne sait d’abord pas de qui il s’agit : l’édification d’un monument funéraire est une pratique de la seconde partie du XIXe siècle. De plus, le vicaire n’a pas connu personnellement Victoire, et le curé est resté au presbytère. Ce dernier commande de combler la fosse. Six cents personnes sont présentes, averties par le fossoyeur de la découverte extraordinaire.
  • La chair des membres semble être celle d’une personne vivante. Un docteur de Cossé-le-Vivien ôte un peu de la peau du bras gauche et fait remarquer la couleur rosie de la chair. Ce détail est consigné dans un procès-verbal déposé aux archives de l’église de Méral.
  • L’anneau, le bras gauche – que l’on savait cassé et qui n’a pas la même flexibilité que le droit – et le corps non amaigri convainquent le curé. Il en fait part à l’évêque, Mgr Wicart, le 21 septembre 1866. La reconnaissance du corps est faite le 4 octobre 1866, en présence d’autorités ecclésiastiques et civiles, et d’une foule de personnes. Le corps, qui est resté à l’air libre pendant plusieurs heures, deux mois auparavant, apparaît aux yeux de tous séché et momifié. Rien, dans la substance du sol, ne peut expliquer ce second état, pas plus que le premier. La dépouille est à nouveau exhumée en 1881, à la demande de Mgr Cléret, pour être formellement identifiée. Elle n’est alors plus entière, ce qui, en raison de l’exhumation précédente, n’est pas étonnant.
  • Une intervention divine ayant été reconnue dans l’état inexplicable de la dépouille aussi bien que dans la vie lumineuse de Victoire, des prières lui sont adressées afin d’obtenir son intercession. Madame Hubert, née Louveau, tombe gravement malade d’une péritonite tuberculeuse. Aucun soin ne la guérit. Deux neuvaines à Victoire Brielle apportent d’abord soulagement, puis guérison complète et soudaine au commencement de la seconde, le 20 juillet 1939. La guérison s’avère définitive : l’intéressée, âgée de quarante-trois ans au moment des faits, mourra à l’âge de quatre-vingt-deux ans. La commission médicale réunie à l’époque conclut « que cette guérison ne correspond pas à une évolution telle qu’on pouvait l’espérer et la pressentir dans la forme grave de péritonite tuberculeuse fibro-caséeuse que présentait cette maladie arrivée à un stade de cachexie avancée et avec les moyens thérapeutiques de l’époque, et que cette guérison n’a pas d’explication médicale connue ».

Synthèse :

C’est au lendemain de la Révolution française et de l’Empire que naît le 31 janvier 1815 Victoire-Françoise. C’est le troisième enfant de Jean Brielle – simple métayer quand il s’est marié, en 1812, devenu ensuite propriétaire, puis laboureur – et de Marie Jégu, du village de Méral, en Mayenne. L’amour du travail, la simplicité chrétienne dans les habitudes, une profonde affection qui unit les parents et les enfants, et surtout la foi qui soutient et élève ces vertus, marquent le foyer. La prière est faite en commun.

Quelque temps après la naissance de Victoire-Françoise, la famille s’établit à la ferme de la Grihaine, sur la même commune. Elle fréquente toutefois le dimanche l’église de Saint-Poix. C’est aussi au curé Ligneul, curé de Saint-Poix, plutôt qu’à celui de Méral, prêtre constitutionnel – le curé Rousseau avait prêté en son temps le serment assorti à la constitution civile du clergé –, que Jean Brielle fait appel pour son mariage, comme ensuite lors du baptême de ses enfants.

Enfant, Victoire se prête aux jeux avec complaisance, mais préfère prier dès qu’elle en a le loisir. Un témoin rapporte : « Je me souviens toujours de son air grave, posé, et pourtant très aimable. Elle jouait peu. Il était évident qu’elle recherchait le silence pour prier. Nous sentions bien qu’elle était pénétrée de la présence de Dieu, et nous avions pour elle une sorte de vénération. Comme elle avait une excellente mémoire et qu’elle était très attentive, elle retenait toutes les instructions qu’elle entendait, et elle pouvait les répéter mot pour mot. Cependant, dans la crainte de les oublier, elle les écrivait : elle eut ainsi un bon recueil d’instructions et de sermons. » Elle demeurera célibataire jusqu’à sa mort, bien qu’elle eût pu prétendre à un heureux parti, car on la disait fort jolie : une âme de silence, toute de modestie, et qui n’aime pas paraître.

Victoire-Françoise est pensionnaire avec sa sœur Marie pendant cinq années à l’école primaire de Beaulieu-sur-Odon, auprès des religieuses d’Évron. Elle y apprend à lire et à écrire, comme à compter. On lui enseigne l’amour et la crainte de Dieu, et les devoirs religieux. Vers l’âge de onze ans, Victoire fait sa première communion. « Sa ferveur en ce jour ravit les assistants », selon le dire d’un témoin. Puis, à quatorze ans et demi, elle rejoint la ferme familiale.

Alors qu’elle est encore adolescente, tous remarquent avec étonnement et plaisir sa gaieté et son amabilité. Elle se montre toujours serviable, parce qu’attentive aux autres. Elle remplit avec dévouement et sérieux sa quote-part de travail à la ferme, que ce soit aux travaux de la maison ou à ceux des champs. Quand des mendiants frappent à la porte de la maison, elle les accueille gracieusement. Après son retour du couvent, où sa santé ne lui permet pas de demeurer – elle a alors vingt ans –, elle se prive de son repas pour donner à manger aux malheureux qui viennent mendier. Elle leur donne de ses propres effets, confectionne des lainages à leur intention, et raccommode la nuit leurs vêtements. Elle visite aussi le dimanche, après la grand-messe, sans prendre le temps de déjeuner, les malades et les pauvres et enseigne le catéchisme aux enfants déshérités du bourg. Puis elle regagne, toujours à pied, la ferme familiale. Il lui faut une heure de marche pour y parvenir.

Attirée par la vie religieuse, Victoire doit convaincre ses parents de son attrait pour le cloître. Son père, qui mourra à quatre-vingt-quatre ans, préférerait la garder auprès d’elle : il l’aime tendrement. Sa mère partage les mêmes sentiments. Mais Victoire, avec respect mais persuasion, obtient leur accord et entre au postulat des Bénédictines du Saint-Sacrement, à Craon, le 5 septembre 1833. Sa santé ne lui permet pas d’y rester. Elle demande alors à rejoindre les sœurs d’Évron, chez qui elle a appris à lire et à écrire. Le verdict est le même : l’âme en peine, elle doit rentrer chez elle, où elle reprend ses tâches domestiques et les travaux des champs. Sa sœur, avec laquelle elle partagera sa chambre jusqu’à sa mort, la voit encore à genoux en prière quand elle se réveille à minuit, à une heure ou à deux heures du matin.

Le 29 avril 1847, durant la troisième semaine de Pâques, on trouve Victoire assise au rouet, un après-midi qu’elle filait. Victoire s’est éteinte sans bruit, mais sa renommée de sainteté ira dès lors grandissant.

Docteur en philosophie, Vincent-Marie Thomas est prêtre.


Aller plus loin :

Chanoine Constant Tonnelier, La Vie de la servante de Dieu, Victoire-Françoise Brielle, Saint-Cénéré, Téqui, 2001, 140 p. L’auteur est docteur en droit canonique et délégué épiscopal pour la cause de Victoire-Françoise Brielle. Son livre est le résumé de la positio, c’est-à-dire du dossier de l’enquête transmise à la Congrégation romaine pour la cause des saints.


En savoir plus :

Abbé René Moriceau,La Sainte de Méral. Notice sur Victoire Brielle, Laval, Chailland, 1882, 64 p.

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