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TOUTES LES RAISONS DE CROIRE
Les saints
n°355

Pise (Italie, Toscane), Palestine

Vers 1117- 1160

Saint Rainer de Pise : la conversion miraculeuse d’un riche négociant

Né à Pise, Rainier est le fils d’un riche négociant. Insouciant quant à son avenir (la fortune familiale le met à l’abri), il devient musicien ambulant et mène une vie assez dissolue, jusqu’au jour où il rencontre de façon providentielle Alberto, un laïc pieux. Dès lors, il va se consacrer à Dieu et multiplie les œuvres de charité. Pèlerin de Terre sainte, vivant dans la pauvreté et l’abstinence, il devient tour à tour ermite et moine cénobite, accomplissant divers miracles. À sa mort le 17 juin 1160, sa réputation de sainteté déborde les frontières de la République de Pise.

C. Lasinio, Gravure à l'aquarelle, XIXè siècle. Retour à Pise et miracles de saint Rainier. / © CC0, via BeWeb.
C. Lasinio, Gravure à l'aquarelle, XIXè siècle. Retour à Pise et miracles de saint Rainier. / © CC0, via BeWeb.

Les raisons d'y croire :

  • Les sources documentaires relatives au saint ont contribué à reconstituer l'histoire, la topographie, la structure urbaine de Pise, ainsi que les maladies, activités professionnelles, us et coutumes locales, mentalité de la société de cette époque, etc. Preuve que ces écrits sont considérés comme historiquement fiables. La source hagiographique la plus importante et la plus ancienne, la Vita Raynerii , a été écrite par le chanoine pisan Benincasa, compagnon et ami de saint Rainier.
  • Il est juste de rapprocher la conversion subite et définitive de Rainier, dont les fruits sont inexplicables à tous niveaux, de celle de saint François d’Assise : même période, même pays, même origine sociale privilégiée, même richesse spirituelle, même éloignement de la société.
  • Éclatante après la rencontre qu’il fait avec Alberto, un simple et pieux laïc, sa conversion est inouïe : rien ni personne ne l’avait jamais préparé à devenir un « autre Christ » (alter Christus). Né dans une famille de négociants, dont il partage valeurs et idéaux, son regard est à tout jamais changé par la grâce : comblé de tout, il renonce à tout pour épouser l’idéal de pauvreté, en lequel il perçoit un idéal, car cet idéal, c’est Jésus. La psychologie (comme toute science humaine) est incapable d’expliquer un tel renversement intérieur et social.
  • Dieu a accordé à saint Rainier le don des miracles en particulier, mais pas seulement : après sa conversion, il réussit tout ce qu’il entreprend dès lors qu’il s’agit d’entreprises au service de l’évangile : vie érémitique, financement par le travail de son pèlerinage en Terre Sainte, construction d’un hospice pour les pauvres…
  • Parmi ses miracles post mortem, il convient d’en retenir au moins deux : il sauve un enfant tombé du deuxième étage d’une maison et un marin parvient à s’échapper d’une tempête en l’invoquant et en jetant de l'eau bénite à la mer.
  • Il est protégé de façon inconcevable et évite tous les obstacles lors de son séjour de 13 ans en Terre sainte. Contemporain de la deuxième croisade, qui se termine par un échec, il est préservé de tous périls et dangers.
  • La popularité extraordinaire de saint Rainier est un fait acquis depuis 864 ans. Inhumée immédiatement dans la cathédrale de Pise après sa mort, à un emplacement exceptionnel - aux côtés de la dépouille d’Henri VII, empereur du Saint-Empire germanique -, sa canonisation par le pape Alexandre III a lieu moins de dix ans après sa disparition.
  • Rainier figure parmi les immenses saints (saint François d’Assise, saint Bonaventure, etc.) dont la vie est devenue un thème artistique : deux siècles après sa mort, évidemment avec le plein soutien et l’aide matérielle des autorités religieuses et politiques, le grand peintre florentin Andrea di Bonaiuto peint des fresques dans le « camposanto » de Pise figurant ses miracles, sa conversion, et divers épisodes de son existence. Un autre maître italien, Antonio di Francesco di Venezia (+1388), achève l’œuvre d’Andrea di Bonaiuto.

Synthèse :

Rainier (également connu sous le nom de Raynerius, Rainerius, Rainier, Rainieri, etc.) voit le jour vers 1117 à Pise, dans une famille de riches négociants. Ses parents, Gandulfo Scacceri et Mingarda Buzzaccherini, appartiennent à l’élite de la République de Pise et l’avenir de l’enfant semble assuré à tous niveaux.

Mais à l’instar de saint François d’Assise au début du XIIIe siècle, le jeune homme délaisse ses études et les privilèges liés à sa condition sociale pour devenir musicien itinérant. Il joue de la lyre et de la vielle à roue et chante bien. Il passe de place en place au grand dam des siens. Les efforts de ses parents pour le ramener à la raison sont vains : sa jeunesse est clairement placée sous le signe de l’insouciance. Rainier mène une vie dissolue, n’hésitant pas à voler de sa nourriture : il a le doigt coupé pour le punir d’un vol de fromage.

Vers 1136, âgé d’à peine vingt ans, Ranieri rencontre un laïc d’origine corse, Alberto Leccapecore, ancien soldat qui a renoncé aux armes pour sa foi et qui après la mort de saint Rainier, se rendra à Paris où Louis VII le prendra comme conseiller. C’est une rencontre décisive qui va changer le destin du jeune musicien.

Pour commencer, Alberto le persuade de confesser ses fautes à un prêtre. C’est bientôt chose faite : l’ancien joueur de lyre dit ses péchés, qu’il considère dorénavant graves et nombreux, en s’agenouillant aux côtés d’un prêtre : confession dont il n’aurait même pas voulu entendre parler quelques jours avant... Peu à peu, Alberto l’amène, dans le partage et la délicatesse, à partager sa vision de la vie et des hommes, celle d’un chrétien engagé. La transformation intérieure de Rainier est à la fois rapide et profonde. En quelques mois tout au plus, il voit à son tour le monde avec les yeux du Christ.

Il entend de mettre sans attendre au service de Dieu. Une idée surgit dans son esprit : se rendre en Terre Sainte, visiter le Saint-Sépulcre, mettre ses pas dans ceux de Jésus… Oui, mais comment faire ? Il n’a pas un sou et il se voit mal demander aux siens de prendre en charge les frais du voyage... Il part sans délai pourtant en mettant ses qualités relationnelles au service de Dieu. En se souvenant de ce qu’il a certainement vu et retenu dans son milieu d’origine, il s’improvise marchand, non pour s’enrichir mais pour parvenir à Jérusalem.

Et contre toute attente il réussit très bien dans cette activité. On le retrouve dans différents ports méditerranéens et en moins de quatre ans, sa fortune est faite.

Cependant, il a promis à Dieu de vivre comme Jésus : en un mot, à rebours des siens en matière de biens terrestres. En 1240, il se débarrasse de toutes ses richesses en les distribuant aux pauvres. Il vêt la robe de pénitent que l’on donne à l’époque aux pèlerins (pilurica) qui se rendent au Saint-Sépulcre. Il partage la vie d’ermites qui, comme lui, ont tout abandonné pour l’Évangile, s’abstenant de nourriture tous les jours de la semaine, sauf le jeudi et le dimanche. C’est de cette époque que sont datés ses premiers miracles. Il passe au total treize ans en Terre sainte.

De retour à Pise en 1153 (ou 1154), il jouit d’ores et déjà d’une réputation de saint et de thaumaturge. Bien que fuyant tous ceux qui viennent le solliciter à titres divers, sa popularité ne cesse de grandir. Dans sa ville natale, il se sent constamment observé, admiré et parfois envié. Lui pense qu’il n’est qu’un grand pécheur en voie de conversion.

Il rend son âme à Dieu sept ans après son retour de Terre Sainte, le vendredi 17 juin 1161.
Ses compatriotes lui réservent des funérailles exceptionnelles et sa dépouille ne tarde pas d’être placée dans la cathédrale de Pise, aux côtés du sépulcre de l’empereur germanique Henri VII. L’un de ses disciples, le chanoine Benincasa, écrit une première biographie dès 1162. Ce texte, traduit dans toute l’Europe, est encore réédité à Pise au milieu du XIXe siècle.

Saint de la charité, saint de la contemplation, Rainier est célébré dans sa ville natale à travers deux fêtes municipales et religieuses qui honorent son extraordinaire dévouement aux pauvres et son abandon légendaire à la providence divine (dont la célèbre Luminara di San Ranieri).

Le pape Alexandre III, son contemporain, l’inscrit au catalogue des saints.

En 1632, l’archevêque de Pise, le clergé local, le magistrat pisan, avec la Sacrée Congrégation des Rites, élit Ranieri comme patron principal de la ville et du diocèse.   

Patrick Sblachiero


Au-delà des raisons d'y croire :

Sur le plan humain, la trajectoire originale de saint Rainier, placée toute entière sous le signe de la Providence, possède un parfum d’aventure et d’imprévisible : rien n’est calculé, rien n’est préparé, tout vient de Dieu. En matière spirituelle, elle rappelle de façon magistrale que les vocations les plus tardives, les engagements les plus déroutants, les cheminements les plus stupéfiants peuvent conduire à la sainteté.


Aller plus loin :

Sur le site santiebeati.it, l'article sur Saint Ranieri de Pise (en italien).


En savoir plus :

  • Vita auctore Benincasa, AASS, juin, t. IV, col. 345-381.
  • Sylvie Barnay, « Rainier de Pise (saint, + 1161) », dans René Laurentin et Patrick Sbalchiero (dir.), Dictionnaire des apparitions de la Vierge Marie, Paris, Fayard, 2007, p. 790.
  • Les diverses informations disponible sur le site Internet Beni Ecclesiastici (vie de saint Rainier, fresques du Campo Santo de Pise, ...).
  • Alain Venturini, « Le Bienheureux Alberto Leccapecore de la Corse à Clairvaux, via Pise, Compostelle et Paris (vers 1090-vers 1155) », Bulletin de la Société des Sciences historiques et naturelles de la Corse, n° 760-761, La Corse et le monde méditerranéen de la fin du Moyen Âge à l’époque moderne, p. 81-100.
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