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Les mystiques
n°436

Espagne

1500 – 1591

Saint Alphonse d’Orozco est emmené en esprit au Ciel

Né à Oropesa, dans la province de Tolède, en Espagne, à l’aube du XVIe siècle, Alphonse entre chez les Ermites de saint Augustin, ordre fondé au XIIIe siècle à partir de communautés éparses qui abandonnèrent la forme de vie érémitique pour celle des ordres mendiants et dont le point commun était la règle de saint Augustin. Ayant reçu de la Vierge la mission d’écrire, il cherche à éveiller et accroître en ses lecteurs le désir spirituel d’aimer Dieu, montrant au préalable combien Dieu, le premier, aime les hommes. Il meurt le 19 septembre 1591 à Madrid. Jean-Paul II l’élève au rang des saints le 19 mai 2002.

© Shutterstock/Doidam 10
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Les raisons d'y croire :

  • Fils du gouverneur d’Oropesa, le jeune Alphonse vit dans le château de la ville et reçoit une éducation soignée, suivie d’une formation universitaire remarquable. Cela semble lui promettre un confortable avenir et une vie agréable, à l’abri du besoin. Il entre pourtant en religion dans un ordre austère, les Ermites de saint Augustin, renonçant ainsi à la joie de se marier et de fonder une famille, et choisissant volontairement la pauvreté et l’obéissance à un supérieur ecclésiastique.
  • En 1549, poussé par la soif de donner Dieu aux âmes, dans le cadre du mouvement de mission initié par saint Thomas de Villeneuve, Alphonse demande à partir comme missionnaire au Mexique. Parvenu aux îles Canaries, une crise d’arthrite fait craindre pour sa vie, de sorte que les médecins l’obligent à revenir en Espagne. Sa volonté missionnaire, bien qu’empêchée, témoigne d’un zèle apostolique remarquable : le soin du salut éternel des Indiens prime pour lui sur sa sécurité, son confort et même sa vie. Ce même zèle lui fait fonder plusieurs couvents en Espagne.
  • Quand l’empereur Charles Quint demande au père Alphonse de devenir le prédicateur attitré de la cour, ce dernier aurait pu choisir de séjourner au palais. Il préfère pourtant, lorsque ses obligations à la cour sont remplies, revenir au couvent Saint-Philippe, à Madrid, pour y vivre la vie régulière communautaire, pauvre, et la soumission à ses supérieurs directs. Ce choix montre une humilité sincère.
  • Son ascèse volontaire s’accompagne de pratiques de mortification personnelle. Il ne prend en effet qu’un seul repas par jour, utilise une planche et de la paille comme matelas pour son lit et ne dort jamais plus de trois heures, affirmant que cela lui suffit pour commencer la nouvelle journée. Si le père Alphonse recherche la pénitence, c’est comme moyen de mieux servir Dieu, pour son amour et celui de son prochain. À Madrid, outre ses obligations à la cour et au couvent, il visite les malades et les prisonniers, et soulage les pauvres. Au couvent Saint-Philippe, il a demandé à occuper la cellule la plus proche du portail d’entrée afin de mieux s’occuper des pauvres gens qui viennent chercher du secours. On reconnaît en lui une grande bonté qui le pousse à s’adresser à tous sans distinction de personne.
  • Sa vie d’austérité et de prière constante lui vaut des grâces extraordinaires de Dieu. Il entre parfois en extase et ravissement pendant la prière. De nombreuses personnes en sont témoins lorsqu’il célèbre la messe et elles racontent autour d’elles les détails de ces événements : sœur Juana Torres, religieuse du couvent de Vallecas, dona Maria de Arzaga, le père Juan de Herrera…
  • Dans ses ouvrages autobiographiques, Las confesiones del pecador fray Alonso de Orozco et Memorial de favores recibidos, Alphonse d’Orozco relate entre autres qu’en 1591, le jour de l’Ascension, alors qu’il en médite le mystère, il est « emmené en esprit au Ciel ». Il précise que « cette expérience admirable du paradis » n’est pas en rêve, mais bien en étant éveillé.

  • Il était public et notoire qu’Alphonse recevait de grandes faveurs du Seigneur dans la prière. C’est pourquoi beaucoup de personnes venaient le solliciter au monastère et on l’appelait « le saint de Saint-Philippe ». Mais, chaque fois qu’on lui attribuait un miracle, il rectifiait qu’il n’avait rien fait de tel et que Dieu seul accomplissait ces miracles.

  • Après sa mort, les témoignages des personnes l’ayant connu sont rapidement rassemblés pour l’enquête préalable au procès de béatification. Des membres de la famille royale – la princesse Isabelle Claire Eugénie, fille de Philippe II et de sa troisième épouse, Élisabeth de Valois –, des personnages de la haute aristocratie – le duc d’Albe, Ferdinand Alvare de Tolède, et le comte (futur duc) de Lerme, François Gomez de Sandoval y Rojas –, les écrivains Lope de Vega et Francisco de Quevedo, ainsi que les religieux ayant vécu avec lui à Valladolid, à Médine, en Castille ou à Grenade, témoignent en sa faveur.
  • Les sept médecins qui examinent son corps en 1603 déclarent unanimement son incorruption et rédigent un certificat de reconnaissance. Le docteur Antonio Ponce, un de ceux qui ont soigneusement examiné la dépouille, déclare que, selon lui, sans un miracle particulier, le corps ne peut pas être dans cet état douze ans après la mort et qu’il ne voit aucun signe d’artifice justifiant une telle conservation.

Synthèse :

C’est au terme de ses études à la prestigieuse université de Salamanque, durant le carême 1520, qu’Alphonse entend un jour Thomas de Villeneuve. Le prédicateur, alors prieur du couvent des Ermites de saint Augustin, dans cette ville, explique alors le psaume 113 : In exitu Israel de Aegypto (« Quand Israël sortit d’Égypte »). L’Égypte est la figure du monde pétri par la triple concupiscence qui rive l’âme aux choses d’ici-bas ; la Terre promise vers laquelle le peuple de Dieu est en marche est l’image de la patrie éternelle : le paradis qui consiste en la présence sans voile de Dieu. La vie consacrée au service de Dieu constitue l’antichambre de ce bonheur infini. Touché également par l’esprit surnaturel qui règne au couvent de Salamanque, Alphonse demande à y entrer. Sous la conduite vigilante du père Louis de Montaya (Luis de Montaya), maître des novices, le jeune Alphonse découvre la spiritualité augustinienne.

Auteur d’une œuvre ascétique et mystique, comme le prieur saint Thomas de Villeneuve, le père Louis de Montaya a probablement fait naître chez le jeune religieux dont il avait la charge le désir et le goût de l’apostolat, notamment par le moyen des livres. Quoi qu’il en soit, Alphonse témoignera plus tard, en 1542, que la Vierge Marie lui a demandé, au cours d’un songe fait à Séville, d’écrire pour faire connaître l’amour divin. Les ouvrages mystiques se succèdent alors. Citons, à ce sujet, par exemple : la Règle de vie chrétienne (1542) et les Jardin de prière et mont de contemplation (1544) – dans ce dernier, l’auteur, en disciple de saint Augustin, tâche de mener son lecteur, à partir des perfections des multiples êtres d’ici-bas d’abord, en passant par l’esprit humain qui cherche la vérité, jusqu’à la vérité suprême que l’intelligence humaine découvre : Dieu qui est le Créateur de toutes choses – ; les Considérations sur les noms du Christ (1544) et le Mémorial du saint amour (1545) ; en 1551, ce sont les Fiançailles spirituelles, puis le Concours de bonus (1562), la Victoire du monde (1566), et le Livre de la douceur de Dieu, en 1576. L’Art d’aimer Dieu et son prochain, publié en 1567, sera réimprimé en 1585. Les écrits célébrant les gloires de Marie ne font pas défaut : ce sont Les Sept paroles prononcées par la Très Sainte Vierge Notre Dame (1556) et le Traité de la couronne de Notre Dame (1588).

Alphonse fait sa profession religieuse en 1523 entre les mains de saint Thomas de Villeneuve. Quatre ans plus tard, il est ordonné prêtre. De 1530 à 1537, il est au couvent de Medina del Campo, dans la province de Valladolid. Il devient en 1538 prieur du monastère de Soria, dans la province homonyme, également en Castille, puis en 1540 de celui de Medina, en Andalousie. Il reçoit la charge de définiteur de la province d’Espagne pendant l’année 1541, puis prieur à Séville de 1542 à 1544, et à Grenade de 1544 à 1548. Il doit aussi visiter les couvents d’Andalousie pour s’assurer que la concorde et la vie régulière y règnent. Comme saint Thomas de Villeneuve avant lui, l’empereur Charles Quint choisit le père Alphonse pour prédicateur officiel, à Valladolid d’abord, à partir de 1554, puis à Madrid lorsque la cour y est transférée en 1561.

Le premier monastère fondé par le père Alphonse en 1556 est le couvent Saint-Augustin, dans son pays d’enfance, le Talavera. Le premier monastère récollet des religieuses augustines suit près de vingt ans plus tard. On appelle en effet « récollet », dans l’ordre des Ermites de saint Augustin, le mouvement religieux qui décida de mener une vie plus austère, à la suite du chapitre général de l’ordre de 1588 : c’est la « récollection ». C’est à Madrid, l’année suivante, que saint Alphonse d’Orozco fonde donc le premier monastère féminin réformé. Il faut encore citer, toujours à Madrid, le Collège de l’Incarnation(el Colegio de la Encarnacion), dit « de Marie d’Aragon », parce que voulu par une dame très pieuse de la haute aristocratie, Marie de Cordoba y Aragon, qui en confia le projet au père Alphonse. Cet ensemble de bâtiments est devenu aujourd’hui le palais du Sénat espagnol.

En août 1591, une fièvre gagne Alphonse d’Orozco, symptôme d’une maladie qui l’emporte un mois plus tard, le 19 septembre. Pas un jour ne s’écoule pourtant sans qu’il célèbre la messe. L’empereur Philippe II, l’infant Felipe et l’infante Isabelle viennent à son chevet. L’archevêque de Tolède Gaspard de Quiroga l’aide à prendre de quoi se sustenter, puis lui demande sa bénédiction.

Le peuple se presse aussitôt pour vénérer celui que tous appellent « le saint de Saint-Philippe » et pour emporter des reliques de celui qu’ils considèrent déjà comme un saint. Le procès de béatification n’aboutira que le 15 janvier 1882, sous Léon XIII. Puis viennent les honneurs suprêmes : le père Alphonse est canonisé par Jean-Paul II le 19 mai 2002. Ses restes reposent actuellement dans l’église des augustines dites du Bienheureux Orozco, à Madrid.

Docteur en philosophie, Vincent-Marie Thomas est prêtre.


Au-delà des raisons d'y croire :

Quand, en 1589, Marie de Cordoba y Aragon, qui s’en remettait au père Alphonse pour la direction de son âme, décide de fonder à Madrid un collège sous le titre de l’Encarnacion et d’en confier la direction et l’enseignement aux Augustins, elle demande tout naturellement au père Alphonse de mener ce projet à bien. Le célèbre peintre Le Greco est chargé de l’exécution des tableaux de la chapelle du collège. On considère que saint Alphonse d’Orozco décida non seulement des thèmes à retenir, mais aussi de l’inspiration spirituelle qui les traverse, bien que leur réalisation n’ait eu lieu qu’entre 1596 et 1600, après la mort du religieux. Six de ces toiles sont conservées au musée du Prado.


Aller plus loin :

F. Lang, Alphonse de Orosco, dans Dictionnaire de spiritualité ascétique et mystique, tome I, Paris, Beauchesne, 1937, p. 392-395.


En savoir plus :

  • Le site du Dicastère de la cause des saints, organe du Vatican, propose une notice sur la vie de saint Alphonseainsi que le texte de l’homélie de Jean-Paul II prononcée lors de la chapelle papale, à l’occasion de la canonisation. Une version anglaise est aussi proposée.
  • Alonso de Orozco, Obras completas, Biblioteca de Auctores cristianos, 2001, I, 1124 pages. Ce premier volume, le seul actuellement paru, contient les œuvres suivantes (en castillan) : Vergel de oracion y Monte de contemplacion ; Regla de vida cristiana ; Tratado de la suavidad de Dios ; Historia de la reina de Saba ;Catecismo provechoso ; Examen de conciencia ; Tratado de la Pasion de Jesu Cristo en siete soliloquios.
  • P. Angel Penna, O.A.R., « San Alonso de Orozco, Mistico Y Sabio », disponible en ligne, en espagnol.
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